Dia verde o dia de mierda

Publié le par Julien

Départ : Gandia
Arrivée : Murcie
Longueur de l'étape : 49,38 km à vélo et environ 400 km en train
Temps de parcours : 4h39m18s à vélo et environ 4 heures de train
Météo : ensoleillé et chaud
Argent dépensé : 29,25 euros

Ce qui devait être placé sous le signe d'une journée verte avec quatre via verde à traverser tourne au désastre. Ce matin, je m'aperçois que monneu arrière est encore une fois à plat. Je mets en retard Alba à son travail qui finit par me laisser seul chez elle en me demandant de fermer la porte derrière moi quand j'ai finis. Ca m'embête de mettre mes hôtes si charmants dans de telles situations. Je répare calmement, cela est devenu coutume après tout. Avant tout cela, je profite de mon sourire encore présent pour garder un souvenir de mes hôtes.

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C'est le pneu regonflé et le moral miné par ces éternelles crevaisons que je quitte Gandia, en plein préparatifs pour célébrer la fête de la ville.

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Les personnes déguisées en parodie de l'armée française avec de gros nez et des lunettes vont chercher les enfants à l'école pour les inciter à les suivre dans les rues et démarrer la fête. De mon côté, je me mets en route pour cette belle journée annoncée.

Une sacrée côte matinale se présente à moi à l'entame de la première voie verte. Elle me prend tellement de court que j'engloutis tout ce que j'ai de sucré en moins de temps qu'il ne m'en faut pour réaliser que je n'ai plus de denrées sucrées désormais. Je sens mes jambes lourdes. Je ne sais pas si c'est lié à l'énergie négative dépensée pour réparer mon pneu, mais je sens que je force. A tel point que je décide de poser pied à terre et de pousser le vélo à bout de bras. Ayant la fâcheuse habitude de vivre dans la projection, je ne m'imagine alors pas à destination en fin de journée. Ces pensées sont mauvaises et j'en suis conscient sur l'instant et j'essaie alors de les évacuer.

Plus tard, quand je penserai rétrospectivement au voyage dans sa globalité, les éléments négatifs me sembleront certainement bien futiles, mais là, sur le moment, ces instants sont déprimants. Je ne sais pas où je puise la force pour continuer de pousser le vélo dans ces cols qui m'avalent, tandis que les nuages avalent ces cîmes.

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Alors que je m'aprête à faire demi-tour pour prendre le train, voire retourner chez Alba, une étincelle de volonté surgit, venue de je ne sais où, mais qui  me pousse juste à avancer sans me soucier de la finalité, comme ça, d'un coup. Cette volonté éclipse soudainement toutes divagations négatives pour apprécier juste les montagnes alentours et penser aux paysages inconnus derrière ce brouillard. Le vélo m'a porté pendant près de 3800 kilomètres et je me dis que je peux bien le pousser un peu.

La montée est lente et je ne sais pas ce qui m'attend mais je puise ma force dans les paysages et au fond de moi, simplement, pour avancer pas à pas. Alors que je tombe sur un panneau annonçant la route à travers ces montagnes de niveau facile, cela inflige un sérieux coup à mon orgueil, mais cela ne dure qu'une fraction de seconde, l'orgueil cédant vite sa place au bonheur de cette sensation de vivre. La difficulté physique dans un tel cadre est surmontée pour peu que l'on sache changer son regard. Je me fiche alors de devoir dormir là, en pleine nature s'il le faut, c'est pourquoi j'avance, sans aucune optique de finalité pour la journée. Alors que cette décision se fait et que j'atteinds le haut d'un sommet, une intuition me fait jeter un oeil à mon pneu arriere. Je vous laisse deviner la suite. Cela me détruit net. Cette fois complètement dépité, je fais demi-tour. Je n'ai plus la force de faire avec ce matériel, je suis à bout. Je me sais capable mentalement et devant d'autres éléments externes, de faire face, mais cette fréquence me coupe littéralement les jambes et jette un sort à ma motivation. Sans broncher cette fois, je fais demi-tour, c'en est trop.

Sur le coup je ne sais pas encore si je me rends chez Alba ou si je prends un train pour je ne sais où, voire un avion en abandonnant le vélo. Alors que je roule avec mon pneu arrière à plat, je choisis finalement de me rendre à la gare de la ville de départ. Je vais essayer de trouver un train pour Murcie où j'aurais du arriver demain. C'est un sacré coup à ma volonté initiale de ne prendre les transports qu'en cas de necessité totale, ce qui n'est pas le cas ici. Mais pour tenter de sauver le voyage, c'est la seule solution qui me convient sur le coup. C'est une décison assez dure. Je pense même à sérieusement continuer sans le vélo s'il devient un tel poids et joue un aussi grand rôle pour me freiner. Cependant, je sais que ce voyage ne serait pas le même en stop ou autrement et mon choix du vélo est vraiment la seule manière dont je veux vivre ce tour. C'est dsan ces moments aussi que je suis heureux d'être seul pour me confronter à ma seule force de volonté. Je ne supporterais aucune remarque extérieure dans cet état. Rien que de relater ces faits est compliqué, mais si je le fais c'est pour rendre compte au mieux des différents sentiments éprouvs durant un tel voyage.

Je suppose qu'il sera fait de nombreux moments de joie et de désillusion et bien que conscient que ces premiers seront les seuls qui resteront, ces derniers sont nécessaires pour mieux apprécier ces instants si courts de bonheur. C'est dans cet état d'esprit que j'arrive à la gare, le pneu souffrant certainement de rouler sur la jante mais je suis heureux qu'il souffre. Bêtement, je pense lui infliger une correction.

A la gare, je trouve un billet. La seule solution depuis Gandia pour rejoindre Murcie est de prendre un train pour Valence, puis de là, un autre pour Murcie. Je vous laisse imaginer mon dépit de me voir revenir sur mes pas. Je ne trouve pas l'ascenseur pour atteindre le quai et descend des escaliers avec le vélo debout sur une roue. C'est également dans cette position qu'il prend l'ascenseur quand je suis accepté chez des personnes habitant en étage. Seulement, là je dois le contrôler et je m'y prends mal. Il m'échappe mais heureusement pas de dégâts. Du coup, je tente une autre technique en le faisant descendre après moi, ainsi j'atteinds le quai sans autre souci. Une heure plus tard, je suis à Valence où je profite de mon heure et demie de pause pour acheter une baguette et finir le chorizo qu'il me reste.

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Alors que je fais la queue pour confirmer que je peux bien prendre ce train avec le vélo, un énergumène s'approche de moi. Il doit me prendre pour un sacré extra-terrestre lui aussi avec mon vélo. Du coup, il se sent plus à l'aise de se trouner vers moi pour me demander où il peut aller. C'est assez vague... Je lui explique que moi je mz rends à Murcie, mais que s'il le veut des trains vont à Barcelone. Je ne sais pas quelle sera destination finalement mais je devrais m'inspirer de lui et ne me soucier que du présent. Vivement le sortie de l'Europe pour ça. Je crois que cette ptite parenthèse incongrue me fait du bien. Elle n'a l'air de rien, mais elle me fait penser qu'il n'est pas un énergumène que de sembler naïf et sans but précis. Peut-être est-ce lui qui a raison. Je suppose que tout cela dépend du référentiel dans lequel on se place. Il serait temps que le mien change pour apprécier chaque moment, mais je vous assure que la sensation de cette épée de Damoclès incessante au-dessus de ma tête représentée par ces satanés pneus me pèsent et m'empêchent d'avoir ce regard différent que j'aimerais voir naître en moi.

Je reste assis à écouter de la musique pour tenter de me détendre et prendre du recul. A l'heure prévue, je monte dans le train pour Murcie. Il arrive trois heures plus tard à destination, pour 19h30, le temps qu'il faut pour que la clim me rende malade. J'espère pouvoir joindre Carlos, un ami d'ami d'amie qui ne m'attend que pour demain. Dans l'expectative, je reste là, immobile, à regarder mon vélo inerte dans un wagon, avec la vitesse du train qui défile.

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Cette vitesse me donne le vertige en multipliant par dix ma vitesse habituelle. Les rares fois ouùj'ose regarder par la fenêtre, je suis dégoûté du paysage qui défile trop vite pour moi. Je me suis habitué au rythme naturel et calme du vélo et ne supporte pas que cela aille aussi vite. Certainement aussi, l'accumulation de toute cette journée ajoute à cette frustration. Je songe à comment régler mes soucis. Je pense faire une bonne pause à Murcie, pas pour moi car moi à Montpellier, Perpignan, Barcelone ou Valence, je n'ai fait que profiter et physiquement je me sens bien.  Ce n'est même pas moralement sur le coup que je suis déprimé mais c'est pour toute la suite du voyage. A ce rythme, sur une piste africaine déserte, si ça se produit aussi fréquemment, je sais que j'abandonnerai. Et aujourd'hui plus que jamais, je sais que cela me laisserait un goût d'inachevé que je ne pourrai jamais effacer. Je suis déterminé à aller au bout et donc à réfléchir tranquillement à une solution à Murcie, si Carlos qui me reçoit me le permet. Je pense prendre des pneus pleins, même si la conduite serait moins confortable et plus lourde, je compenserai avec le fait de ne plus avoir certains éléments de ma boîte à outils, comme la pompe ou le kit de rustines. Ainsi, je pense aussi alléger le poids sur les roues arrières qui portent peut-être trop de poids. Si cela me permet de ne plus avoir à me soucier de cet aspect du voyage qui me pèse sérieusement, je suis prêt à considérer toutes les solutions. J'écris ces mots depuis le train qui me mène à Murcie, je m'arrête pour le moment et reprendrai l'article une fois sur place, de chez Carlos ou depuis un hôtel.

Je suis donc bien arrivé et Carlos a eu la gentillesse de m'accueillir un jour en avance. Nous n'irons porté le vélo à réparer que lundi. A bientôt donc pour savoir si je vais enfin me débarrasser d'un fardeau. Je peux vous dire que je suis impatient de vous écrire moins...

Publié dans Espagne

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